Après le congrès EELV

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note Jean-Luc Mélenchon 29 11 2022

Les votes pour le congrès de EELV ont eu lieu. Il est possible que je n’ai rien compris. Le fait est que ce n’est pas toujours simple. Mais je ne partage pas l’analyse de ceux pour qui le congrès d’EELV serait un désaveu de la Nupes, comme l’a déclaré Yannick Jadot. J’ai compris le contraire. Si l’on met de côté le résultat du vote sur sa propre motion, assez décevant après sa campagne présidentielle, tout le reste des votes sur les motions de ce congrès valident au contraire, chacun à sa façon, la nouvelle stratégie commune. « La continuité l’emporte. Les dirigeants qui ont participé à l’accord pour les législatives de 2022 sont reconduits, ceux qui essayaient de mettre en cause cette alliance sont marginalisés. En ce sens le vote des militants écologistes pour le congrès d’EELV est une bonne nouvelle pour la NUPES » écrit mon camarade Francis Parny (Communiste insoumis) dans une boucle d’Insoumis.

Pour ma part, je n’en suis pas surpris. Quel que soit l’angle d’analyse ou la priorité que l’on donne à la volonté d’affirmer une identité de parti ou de doctrine, le bon sens conclu toujours de la même façon : nous sommes obligés de reconstruire entièrement l’autorité dans le peuple que nos partis et mouvement veulent incarner. Et cela ne se conçoit pas dans une compétition qui opposerait et diviserait. Surtout depuis que nous avons signé un accord électoral et un programme partagé de 650 mesures. Et après que notre intergroupe parlementaire ait bien fonctionné depuis un semestre et surmonté toutes les difficultés et divergences ponctuelles.

Retourner chacun à sa tranchée après cela, serait démoralisant pour chacun et surtout nous rendrait absolument incapable de convaincre qui que ce soit de rallier nos combats. La compétition n’est pas la seule alternative à la fusion dont aucun de nous ne veut. Une autre attitude est possible : l’émulation. Cette attitude consiste à vouloir égaler ou surpasser quelqu’un dans un domaine commun. Car autant le dire de nouveau : il est juste que chacun veuille être autonome et souverain dans ses décisions. Il est normal que chacun mette en œuvre jusqu’au bout ce à quoi il croit. Autrement dit : la NUPES n’est pas le plus petit commun dénominateur auquel chacun serait contraint. De cette union-là, personne ne veut. Elle serait réductrice et étouffante. Et le nivellement qu’elle produirait ne convaincrait non plus personne de venir lutter avec nous. Les Insoumis ne l’acceptent pas pour eux pas plus qu’aucun des trois autres partis. Pourrions-nous nous accorder pour le dire ensemble ? Le jeu mortel des médias trouverait peut-être une occasion de se porter plus intelligemment à notre rencontre. Car pour l’instant, la bêtise éditoriale règne : soit nous sommes d’accord et cela prouve la soumission de tous à LFI et à Jean-Luc Mélenchon (s’il vous plait !) soit nous ne le sommes pas ou bien l’un ou l’autre engage une de ses propres campagnes et alors « la NUPES se déchire » (« se divise », « se fracture », « hésite », « doute », « se contredit »).

Naturellement, aucun d’entre nous n’est dupe du petit jeu qui se trame de cette façon. La vieille presse de centre « gauche » et la meute macroniste ont besoin de faire oublier l’état pitoyable de l’alliance de la minorité présidentielle à l’Assemblée nationale. Et bien sûr, nous voyons aussi comment les fractions résiduelles de la vieille gauche tache de se glisser dans le tableau pour prendre la lumière qu’elles ne peuvent trouver autrement. Il n’est pas nécessaire de répliquer ni même de commenter. Tout cela n’a ni impact ni influence sur le réel de masse. Ce n’est donc pas pour cela que j’en parle.

Je voudrais vraiment proposer à toute la NUPES ce que j’ai proposé naguère à mes propres camarades. L’émulation comme mode de relation entre chacun. L’émulation plutôt que la compétition. L’émulation est ce qui poussera à conquérir des consciences nouvelles, des sympathies, des adhésions, des partages. Et à la fin, l’union étant faite de membres plus forts, tout le système sera plus fort à son tour. Bref, il n’y a aucun besoin d’être mutuellement meurtriers pour être apprécié.

Pouvons-nous échapper à la malédiction de « l’union-dissolution-de-soi » sans passer par la case « union-démolition ? « Marine Tondelier dans son adresse aux militants après le vote, ne remet pas en cause la NUPES, écrit encore Francis Parny. Elle dit simplement que l’écologie doit se renforcer, qu’elle doit « cultiver son jardin ». Mais elle propose ce chantier au sein même de la gauche, pour fortifier, en quelque sorte, cette alliance. Elle a raison, l’union ne doit pas se faire comme elle s’est faite sous sa forme « union de la gauche » en faisant disparaître l’originalité de chaque formation au profit d’une hégémonie uniquement électorale d’un des alliés. (…) Jamais alliance victorieuse ne se construira en amoindrissant l’identité d’une de ses composantes. Cette diversité est nécessaire à l’enrichissement commun, à condition bien sûr d’avoir la même boussole. Cette boussole, nous l’avons, elle se manifeste dans le mot de rupture ; rupture avec les politiques précédentes menées par la droite ou par une gauche qui se définissait comme « gauche de gouvernement » en oubliant de dire ce qu’elle voulait faire. »

En tous cas, c’est la voie que nous avons choisi aux insoumis. Nous ne menons aucune polémique ni surenchère avec nos alliés. Nous travaillons sans pause ni trêve à nous renforcer nous-mêmes dans la sympathie et l’audience des milieux populaires.

Nous le faisons dans l’action, le soutien aux luttes, la proposition de mobilisation. Tout doit pousser vers la même direction qu’est l’auto organisation des gens et leur implication dans le règlement des questions qui les concernent. L’alternative que nous proposons appartient au peuple lui-même. A présent, au front social s’ajoute la force du front institutionnel où nous combattons et harcelons frontalement la macronie déjà mise en débandade à plusieurs reprises et s’avançant doucement, chaque jour davantage, vers la débandade pure et simple.

Actuellement, nous avons engagé une campagne de meetings dans tout le pays contre la vie chère. Nous organisons en même temps une tournée des mobilisations en fac animée par Louis Boyard. Le 3 décembre, les groupes d’action insoumis auront une action commune dans tout le pays. Voilà. De toutes nos forces nous dynamisons, nous mobilisons, nous éduquons, nous argumentons. Mouvement « éclaireur et déclencheur » nous n’éprouvons aucun besoin de nous manifester en contre de nos alliés. Pourquoi n’en feraient-ils pas autant à leur tour ? Encore une fois, c’est l’action commune qui fédère une coalition. Sinon quoi ?

Dans ce contexte, la question de la liste commune aux élections européennes doit venir en ordre logique. Quelle priorité ? La compétition avec ses partenaires ou celle contre l’alliance macroniste. Notre méthode est simple. D’abord les objectifs communs : nous avons le texte du programme partagé sur le sujet. C’est déjà beaucoup. Et cela prouvera que ce n’est pas un leurre tactique électoral de dernière minute. En dire davantage ? On ne peut imaginer vouloir transformer une élection en un exercice d’adhésion publique à toute une idéologie de parti. Ensuite : la composition de la liste ? Une discussion y suffira si le but n’est pas de brutaliser le cousin. Au total, qu’est-ce qui sera mesuré ? Surement pas le nombre de guirlandes sur le sapin électoral ! Le résultat mesurera le rapport de force entre macronistes, fascistes et nous. Tout le reste est considération partidaire sans objet réel.

Bonne chance aux résultats du congrès de EELV. Et à bientôt dans le combat commun.